mercredi 12 avril 2006

Ensemble PLINIUS M8 et SA 201


Origine : Nouvelle-Zelande - Prix préampli M8 : 3600 € - Prix ampli SA 201 : 5860 € - distribué en France par Jason Diffusion




Le préamplificateur Plinius M8 et l’amplificateur M–201 reprennent bien entendu l’apparence visuelle classique et rassurante des appareils de la marque : épaisse face avant aux bords courbes en métal anodisé, et présentation minimaliste (le bouton de volume est la seule commande apparente sur le préampli). La construction interne comme externe est en tout point exemplaire et évoque sans ambiguïté celle d’appareils à vocation professionnelle (présence de prises XLR). Le poids des ces éléments est à la mesure des matériaux employés (près de 6 kg pour le préampli, pas moins de 25 kg pour l’ampli). Enfin, la télécommande - qui pilote toutes les fonctions du préampli – se présente sous forme d’un massif lingot d’aluminium qu’aucun de vos visiteurs ne pourra glisser dans sa poche par inadvertance !

Les modèles M8 et SA–201 héritent directement des solutions techniques développées sur le modèle haut-de-gamme Odeon à 6 canaux. On le verra plus loin, ces électroniques très bien étudiées sont capables de reconstituer une scène sonore impressionnante de réalisme ; à tel point que l’on peut presque se poser la question de la véritable utilité d’un système multicanal pour la reproduction musicale pure, mais ceci est un autre débat.



En l’occurrence, l’amplificateur SA–201 utilise ni plus ni moins deux modules de puissance dérivés de ceux de l’Odeon, ainsi qu’une imposante section alimentation dédoublée comprenant deux transfos toriques et une batterie de gros condensateurs de filtrage.

Par ailleurs, les ingénieurs de Plinius affirment avoir développé des circuits polarisés en classe AB capables d’afficher les qualités de circuits travaillant en classe A. Néanmoins, la recherche de performances mesurables aux valeurs superlatives n’est pas forcément la préoccupation majeure de Plinius, comme en témoignent un temps de montée de 4 µs pour l’ampli, ou un taux de THD juste inférieur à 0,5 % sur le préampli. Les facteurs de bruit sont déjà plus impressionnants avec 80 dB (pondération A) et 90 dB (non-pondérés) pour le préampli et l’ampli respectivement.

Enfin, le constructeur indique, pour l’ampli, une rotation de phase comprise entre 0 et – 14° entre 20 Hz et 20 kHz. C’est bien en revanche dans de tels compartiments de mesure qu’il faut chercher l’explication de la très bonne performance cet ensemble en matière d’image stéréophonique.

Utilisation

Capable de délivrer 225 W par canal sous 8 Ohms y compris à des charges complexes, l’ampli SA–201 ne devrait pas rencontrer de difficulté majeure avec la grande majorité des très bonnes enceintes du marché. En tout état de cause, il s’est avéré parfaitement capable d’alimenter une paire d'enceintes Dynaudio C2, via le câble h.p. Synergistic Research Resolution Reference.

La transparence bienveillante du préampli permet également de profiter au maximum de la richesse de sources de haut niveau, tout comme d’effectuer le choix de câbles de liaison conformes aux goûts de l’auditeur. La manipulation du préampli n’amène aucun commentaire particulier tant la simplicité prévaut, et s’effectue principalement via la télécommande et grâce à l’aide de l’afficheur LED arboré par cet élément. L'un des points forts chez Plinius reste l'abondance et le niveau de qualité de la connectique.




Ecoute

La restitution des timbres est incontestablement un point fort de ces électroniques, la palette sonore étant en toute circonstance riche, variée et somme toute très naturelle. On identifie et l’on différencie sans aucune difficulté le timbre de tous les types d’instruments, qui acquièrent ainsi une consistance très rassurante. A la différence de certaines électroniques (certes moins onéreuses) avec lesquelles la reproduction semble hâtive et comme peinte à grand traits, les couleurs tonales sont ici déposées avec beaucoup de délicatesse et de nuance.

Bien que nous n’en soyons pas toujours partisans, la critique audio est une discipline dans laquelle il s’avère quasiment indispensable de disséquer quelque peu la bande passante subjective d’un matériel. Ici, la cohérence entre registres est telle qu’il est difficile de procéder à cet exercice. Globalement, l’équilibre spectral est très horizontal et contribue à une grande harmonie entre matière sonore et définition subjective. Le registre grave bénéficie d’une articulation - on pourrait dire d’une légèreté - hors norme, ce qui ne signifie nullement qu’il soit anémique. Mais, à coup sûr, aucun effet d’embonpoint n’est à déplorer : le grave et l’extrême grave sont tout au contraire vifs et bien tendus. Le medium, à peine favorisé, donne une présence très réaliste aux voix et aux instruments s’exprimant dans le même registre. L’aigu file haut et éclaire d’une belle lumière tous les événements percussifs de nature métallique par exemple.

D’une manière générale, la restitution des appareils Plinius n’est jamais tonitruante, même si les puissances affichées sont assez élevées. Il en va ainsi de cet ensemble, qui incarne une espèce de force tranquille imperturbable plutôt qu’une fougue mal contenue : il se dégage donc des écoutes effectuées un sentiment de grande maîtrise des haut-parleurs au servie d'une restitution très apaisée. Si les attaques ne sont pas hallucinantes de rapidité, elles sont néanmoins suffisamment marquées pour ne pas dénaturer l’enveloppe des instruments. La microdynamique est bien au rendez-vous, et, conjuguée à un pouvoir d’analyse assez poussé, elle permet de conférer énormément d’humanité aux inflexions d’une voix ou aux phrasé d’un saxophone. Sans donner dans le lénifiant, la restitution reste donc toujours très posée, excessivement musicale, excluant toute forme d’agressivité.

La scène sonore est à la fois très précise, très stable et d’une ampleur remarquablement naturelle, aussi bien en largeur qu’en profondeur. Avec des enregistrements naturels sur ce critère, un quatuor à cordes reste bien focalisé entre les enceintes, l’orchestre symphonique bénéficie lui d’une largeur et d’une profondeur nettement accrues, et, enfin, les mixages complexes d’un enregistrement de type variété déploient très largement leurs nappes sonores. Le tout sans aucun effet de grossissement artificiel : du naturel, rien que du naturel ! Ca paraît simple présenté comme cela, mais combien d’appareils restent fermés sur ce critère, tandis que d’autres tendent à reproduire en permanence une scène exagérément large, sans différentiation notable entre petites et grandes formations. Sans parler des chanteurs ou instrumentistes passés à la loupe, quand ce n’est pas au microscope électronique.

Cet ensemble fait déjà merveille sur des quatuors à cordes (Franz-Xavier RichterQuatuors à cordes Opus 5 - Ensemble Rincontro – Disques Alpha). Dès les premières mesures, une scène quasi-photographique se déploie devant nous (en profondeur également) tout en restant bien cantonnée entre les enceintes. Voici un critère qui ravirait un ingénieur du son : il n’y a aucune raison pour qu’un quatuor occupe l’espace d’un orchestre symphonique. Les instruments sont bien en place, et bénéficient d’un détourage et d’une séparation exceptionnels. Les coups d’archets sont marqués sans excès, et donnent à l’interprétation une bonne respiration musicale, un pouvoir de conviction certain. Le violoncelle est superbe de boisé.

Si vous n’avez jamais rencontré Stan Getz, notamment lorsqu'il jouait au Café Montmartre à... Copenhague, écoutez-le avec les Plinius : il est palpable. Tout est là : la respiration, les bruits de clés, le corps du saxophone, mais aussi et surtout les inflexions du message et le vibrato qui rendent l’écoute superbement musicale. Restitution très sereine, qui incite à l’écoute prolongée. Et toujours, cette taille très réaliste des instruments, cette focalisation hors pair. Les applaudissements entre morceaux sont très naturels, très doux même, à l’exact opposé du crépitement irritant.

L'album Hotels & Dreamers d'Allan Taylor (chez Stockfish Records), très bien enregistré, peut facilement faire illusion sur bien des systèmes. Néanmoins, sur des ensembles présentant le complexe de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf, la ligne de basse a tendance a emplir tout l’espace, et la voix d’Allan Taylor est dilatée à l’extrême. Ca peut faire de l’effet, mais où est le naturel ? Avec les Plinius et leur fort pouvoir de séparation, les instruments et le chanteur reprennent leur juste place, sans pour autant que le morceau ne perde d’ampleur. La basse est très profonde mais n’envahit plus la scène, les percussions du second plan … restent au second plan, mais sans manquer d’impact. Le tempo, subjectivement ralenti par rapport à d’autres écoutes, permet pour ainsi dire de se promener (en pensée) dans le studio d’enregistrement et de rester sensible à tous les événements sonores.

Une fois encore, le côté apaisé de la restitution sied à merveille à l’œuvre de Philip Glass, dont les motifs musicaux s’étirent en longueur (sur Itaipu par exemple). Les chœurs feminins (au fond à gauche) et masculins (au fond à droite) respirent merveilleusement en dépit d’un éloignement très perceptible. Placées au second plan, les percussions restent très précises, très détaillées. Les cordes et les flûtes au premier plan sont d’un réalisme confondant. Mais penser que cet ensemble n’est pas capable d’energie serait se tromper : l’intro tonitruante de la 5e Symphonie de Malher (version Riccardo Chailly et le Royal Concertgebouw chez Decca) passe pratiquement sans limitation, sans ralentissement (et à coup sûr sans accélération caricaturale). La scène sonore s’étend largement devant l’auditeur, faisant complètement oublier la présence des enceintes. Les motifs aux timbales sont bien matérialisés, et il n’y a peut être que lors des plus forts tutti que l’on pourrait souhaiter descendre encore un tout petit peu plus bas dans le grave.

Conclusion

Même si le travail de critique audio est loin d’être pénible, il y a des appareils dont la personnalité est vite cernée, et qui, tout plaisants qu’ils soient, n’incitent pas forcément aux heures supplémentaires. Avec cet ensemble Plinius, c’est tout le contraire qui se produi : on est instantanément sous le charme de ces électroniques et l’on se surprend vite à écouter plus longuement les extraits sélectionnés pour le test, à passer davantage de morceaux sur les disques choisis.

Pas pour rechercher l’émotion forte, ni l’extrait qui fait se dresser les cheveux sur la tête ou trembler la baie vitrée … non, plutôt pour retrouver l’émotion vraie d’une œuvre, dans le cadre d'une reproduction en vraie grandeur. Car ces Plinius font partie des appareils qui font beaucoup de musique, dont on apprécie le grand naturel … et qu’il est bien dommage de devoir restituer. Nul doute que leur magie en feront des compagnons très appréciés sur le long terme.

Spécifications constructeur

Préampli M8 :
- Bande passante : 20Hz à 20kHz ± 0.2dB.
- Distortion : inférieure à 0.5% (THD)
- Facteur de bruit : supérieur à 80 dB (pondéré A)
- Sensibilité : 125 mV rms (entrées asymétriques) – 62 mV (entrées symétriques)
- H x L x P (mm) : 90 x 450 x 400

Ampli SA 201 :
- Puissance : 225 watts continue par canal sous 8 Ohms. Les deux canaux en service entre 20Hz et 20kHz
- Courant de sortie : 40 A en crête par canal
- Bande passante : 20Hz à 20kHz ± 0.2dB. -3dB à 1Hz et -3dB à 70kHz
- Temps de montée : 4 µs
- Facteur de bruit : supérieur à 90 dB (non pondéré)
- Distortion : typiquement inférieure à 0.05% (THD) à la puissance nominale. 0.1% (THD + IM) avant écrêtage.
- H x L x P (mm) : 170 x 445 x 453